Note d’actualité
Si le Conseil européen d’Athènes n’a rien apporté de fondamentalement nouveau (vu que la décision d’admettre dix nouveaux pays avait été prise à Copenhague et que leur entrée dans l’Union ne deviendra effective que le 1er mai 2004), le choix du site, de même que la présence collective et la prestation solennelle des protagonistes ont incontestablement donné de l’allure à la cérémonie.
Au fait, la signature du volumineux traité d’adhésion de 5000 pages eut lieu au pied de l’Acropole, la présidence grecque de l’UE coïncidant avec la traditionnelle symbolique européenne. Pour les pays candidats, le sommet ouvre une période intérimaire qui les mènera directement à l’adhésion pleine et entière d’ici à peine plus d’un an, tandis que pour les Etats membres actuels, c’est surtout l’aveu que l’élargissement a finalement pris le pas sur l’approfondissement de l’intégration.
La Hongrie signataire du traité d’adhésion
Parmi les 220 participants officiels invités à la cérémonie de signature (chefs d’Etat et de gouvernement des membres actuels et futurs, hauts responsables de la Commission et du Parlement européen, secrétaire général de l’ONU), la délégation hongroise comprenait – à côté des deux représentants plénipotentiaires, à savoir le Premier ministre Péter Medgyessy et le ministre des Affaires étrangères László Kovács – le président de la République Ferenc Mádl, son prédécesseur Árpád Göncz et les anciens Premiers ministres Péter Boross, Gyula Horn et Viktor Orbán.
Les règles d’encadrement strictes définies par la présidence grecque ont laissé à chaque chef de délégation trois minutes pour prononcer son discours. Celui du Premier ministre Medgyessy avait pour leitmotif le thème des minorités hongroises, avec des réflexions sur « la nation déchirée pour laquelle l’Union européenne offre une chance de se réunifier au-dessus des frontières », sur « l’UE qui comprendra beaucoup plus que 10 millions de Hongrois », et il a même adressé un message séparé aux minorités hongroises des pays voisins qu’il entendait rassurer en affirmant que Budapest « aura des moyens plus efficaces que jamais pour la défense de leurs intérêts », « oeuvrera pour l’adhésion au plus vite possible de ses voisins » et « accordera une attention particulière aux Hongrois qui resteront, pour des raisons géographiques, hors des frontières de l’Union ». Le chef du gouvernement hongrois n’a pas non plus manqué l’occasion de valoriser le rôle pionnier qu’a joué Budapest dans la chute du Mur de Berlin (en ouvrant notamment la frontière austro-hongroise) et de vanter « le talent, le courage et la vaillance du peuple hongrois qui donnera un nouvel élan à un avenir européen ambitieux ».
Vers le statut d’Etat-membre
La signature du traité implique, sur le plan concret, que les accords conclus pendant les années de négociations deviendront, tels qu’ils sont entérinés dans le document d’Athènes, le point de référence (droit communautaire originaire, dans le jargon juridique) lequel – à l’instar de tous les traités fondateurs, leurs modifications, leurs compléments et tous les accords d’adhésion précédents – primera sur les législations nationales.[1]
Dans l’immédiat, elle ouvre une période intérimaire pendant laquelle les Etats membres « en passe d’adhérer » s’accoutumeront au travail quotidien de l’UE, notamment en envoyant dans les différentes enceintes communautaires leurs représentants respectifs. Ceux-ci auront un statut d’ « observateurs actifs », signifiant qu’ils participeront aux mécanismes de décisions – seront donc présents et prendront part au débat – sans avoir le droit de vote. Dans le cas de la Hongrie, 150-200 observateurs seront délégués à l’UE, dont 24 siègeront au sein du Parlement européen dès le 1er mai prochain.
Plus de questions que de réponses
Malgré l’indéniable importance de l’événement protocolaire qui s’est déroulé à Athènes (et la volonté partagée par tous de ne pas gâcher la fête), le climat du sommet fut considérablement alourdi par les incertitudes qui pèsent sur le fonctionnement de l’Union élargie, et par les séquelles des divisions au sujet de l’Irak, lesquelles – malgré les incontestables efforts de rapprochement sur la base du plus petit dénominateur commun – augurent mal d’une concertation à 25. Pour ce qui est de la Convention, elle semble être dans l’impasse la plus totale et aucun accord possible n’est apparu à Athènes entre les « petits » Etats et les « grands » sur les institutions de l’Europe élargie. Et en ce qui concerne le contenu politique de celle-ci, la polémique continue : tandis que le discours du président français soulignait que « L’Union, c’est surtout une ambition collective, des disciplines partagées, l’affirmation d’une solidarité, le souci de se tourner naturellement vers sa famille européenne », son homologue polonais a jugé opportun de remarquer que « Nous voulons que l’Europe se base sur des liens transatlantiques raisonnés ».
Pour prendre la mesure de la gravité des divergences d’approche, il convient de mentionner les propos du commissaire allemand Günther Verheugen. Ce dernier – préférant d’abandonner un moment son habit de M. Elargissement, pour laisser apparaître les inquiétudes d’un intégrationniste – a reconnu que « Certes, il aurait mieux valu réformer l’Union avant de l’élargir. Mais nous ne pouvions pas les faire attendre plus longtemps ».
[1] Evidemment, ceci ne prendra effet qu’avec l’entrée en vigueur du traité d’adhésion, c’est-à-dire après les ratifications nationales qui doivent se terminer d’ici le 30 avril 2004 au plus tard.
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