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Perspectives et limites de l’Union européenne dans la lutte contre le terrorisme

Európai Szemle, 2004/2 - 01 aout, 2004
Etude et analyse
Hajnalka Vincze

Par pure coïncidence, c’est à Madrid, en décembre 1995 que le sommet de l’UE eut lieu où les chefs d’Etat et de gouvernement des Quinze ont affirmé, pour la première fois, au sujet du terrorisme tout ce qu’ils ne pouvaient que répéter huit ans après – à la suite des attentats du 11 mars 2004.

Le piétinement spectaculaire est en grande partie due à ce que l’on pourrait appeler le « paradoxe européen de terrorisme ». C’est-à-dire que « si « l’approche européenne de la lutte contre le terrorisme constitue la stratégie la plus viable – sinon la seule viable – contre le défi du soi-disant nouveau type de terrorisme, sa mise en œuvre trébuche inévitablement sur les contradictions irréconciliables au sujet des ambitions politiques. Le problème n’est donc pas de ne pas reconnaître la bonne direction, mais d’être incapable de la suivre à cause des obstacles politiques relatifs à la logique de l’intégration. Dans le domaine de l’intégration versus souveraineté nationale, comme dans celui de l’autonomie versus dépendance transatlantique. En d’autres termes : la lutte contre le terrorisme met à la surface les contradictions qui opposent les Etats-membres au sujet de la vision d’une Europe politiquement intégrée et autonome, et sur le volet « politiquement intégrée » et sur celui d’« autonome ».

La « typologie européenne du terrorisme » met l’accent sur le changement survenu dans l’intention destructrice, et sur le caractère éminemment global – dans son fonctionnement, ses visées stratégiques et ses racines – du terrorisme dit de type nouveau.

Sous le titre « Etat des lieux de l’UE de l’anti-terrorisme », l’attention est attirée par le fait qu’il s’agit d’un domaine encombré d’acteurs et d’instruments. Ce n’est pas seulement le bras de fer entre les institutions de l’UE – et entre les logiques d’intégration supranationale ou intergouvernementale qu’elles incarnent – qui mène à des structures et des solutions souvent parallèles. Mais les services et organismes nationaux des Etats-membres, eux aussi, poursuivent et transposent leurs rivalités internes en tenant à être représentés, chacun d’entre eux, au niveau européen afin d’illustrer leur importance.

Pour ce qui est des grands chantiers de la lutte contre le terrorisme de l’UE, il convient de noter que « parmi les compétences multiples et diversifiées de l’Union il serait difficile de trouver un domaine où la lutte contre le terrorisme ne soit apparu, après le 11 septembre, comme un slogan stimulateur en vue de plus d’intégration ». Même si en matière de contre-terrorisme, la responsabilité première incombe aux Etats-membres. Néanmoins, il est indéniable qu’une lutte de position et de prestige est en cours entre les institutions (Conseil et Commission) et les logiques d’intégration (intergouvernementale et supranationale) à propos du contre-terrorisme devenu la nouvelle force d’entraînement dans l’activité de l’UE (celle accompagnée du plus grand intérêt et d’attentes par l’opinion publique). »

Après avoir présenté le « rôle de coordination », « la prévention et la poursuite des crimes relatifs au terrorisme » et la « gestion des conséquences des attentats éventuels », notre attention se tournera vers les « spécificités de l’approche européenne ». Il s’agit notamment du fait que l’Europe ne se laisse pas entraîner dans une logique de confrontation totale, elle refuse de considérer la lutte contre le terrorisme comme une ‘guerre’, tout comme elle refuse d’exagérer l’importance des moyens militaires de l’arsenal antiterroriste, et elle refuse de voir dans le terrorisme et dans la lutte contre lui une grille de lecture générale.

Sur le plan des mesures politiques concrètes, Christopher Patten, commissionnaire chargé des Relations extérieures, avait identifié quatre dossiers à traiter en priorité afin d’éviter le soi-disant « choc des civilisations ». Il s’agit, en premier lieu, de gérer d’une manière impartiale le conflit israélo-palestinien, d’accompagner le processus de réforme et de modernisation interne du monde arabo-musulman, de « corriger » autant que faire se peut, les effets dévastateurs de l’aventure irakienne et de décider, d’une manière responsable, des suites à donner à la candidature turque à l’UE, tout en tenant compte du fort symbolisme qui s’y attache. Patten a également souligné que « Comme il n’y a pas de développement sans la paix, il n’y a pas non plus de paix sans le développement. L’idée d’une connexion étroite entre la paix et le développement n’est point une nouveauté. Les arguments moraux pour gérer les conflits et la pauvreté sont tout à fait clairs. Toutefois, l’étendue du problème et la dimension alarmante des événements récents y ont ajouté l’argument de la préservation de nous-mêmes. Pour dire simplement : nous n’avons pas d’autre choix que de considérer que la promotion du développement durable fait partie de nos efforts pour une sécurité globale au même titre que les investissements destinés à nos forces armées ».

En guise de conclusion, on peut observer que le principal obstacle à une action européenne d’efficacité maximale – conformément au paradoxe européen de terrorisme évoqué dans l’introduction – réside dans l’état déséquilibré de l’intégration et la non-clarification de la question d’autonomie stratégique : l’UE souffre avant tout du manque de vision et de volonté politiques indispensables pour corriger ces anomalies. Mais cela ne veut en aucun cas dire que l’UE serait condamnée à l’impuissance tant que ces Etats-membres tardent à se lancer dans une nouvelle voie (celle de la logique d’intégration différenciée suivant les ambitions politiques). Primo : la plupart des mesures à prendre dans le domaine antiterroriste seraient de toute façon à l’ordre du jour car le cheminement vers « l’union toujours plus étroite » les rend incontournables. Secundo : sur le dossier le plus délicat de l’échange d’informations, des coopérations plus restreintes fonctionnent depuis longtemps. A cet égard, le plus important est de veiller à ce que des préoccupations rhétoriques et une européanisation plus spectaculaire que réelle ne viennent mettre à risque une collaboration opérationnelle bien rodée, dont le caractère vital se vérifie jour après jour. Tertio : les concertations plus en plus fréquentes à Vingt-Cinq en matière de contre-terrorisme remplissent un rôle de socialisation non négligeable – même si les mesures concrètes les plus critiques sont prises en dehors des cadres le l’Union.

Résumé de la note d'analyse intégrale en hongrois.


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Tags:
ue, terrorisme


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