03 aout, 2013
Brève
Hajnalka Vincze
Brève
Le Service européen d'action extérieure (SEAE) vient d'apporter à son tour une première pierre au sommet « Défense » de décembre. Notamment sous la forme d’un rapport, intitulé « Révision stratégique », sur sa propre organisation et fonctionnement.
On y trouve, pour ce qui concerne le volet « sécurité et défense », tantôt des initiatives d’ordre bureaucratico-institutionnel (fusionner les divers « centres d’urgence » de l’UE, remplacer les représentants des présidences tournantes par des gens du SEAE à la tête des groupes de travail), tantôt des propositions de bon sens qui sont dans les tuyaux depuis longtemps (accélérer les procédures de prise de décision, de même que les délais de financement et d’acquisition). Tantôt des interrogations vagues (sur les domaines de responsabilité et les chaînes de commandement, ainsi que sur la disponibilité de l’expertise militaire dans les différents départements), qui restent à clarifier par les Etats avant l’échéance de décembre. On notera en particulier la phrase « sans préjudice du profil spécifique et du statut administratif du personnel militaire au sein de l’EMUE (Etat-major de l’UE), des pistes doivent être explorées pour faire en sorte que leur expertise soit plus largement et plus directement à la disposition d’autres départements du SEAE, de même que dans les délégations UE ». Si, à première vue, le principe d’introduire la perspective militaire partout où il en manque apparaît plus que séduisant, toujours est-il qu’à moins d’étoffer au préalable l’EMUE, le risque est réel de voir ce dernier émacié et éparpillé dans tous les sens.
La dernière Lettre de la Représentation militaire française à l’UE se propose d’aborder trois sujets d’actualité. Premièrement la stratégie européenne de sûreté maritime en cours d’élaboration par le SEAE et la Commission, laquelle devrait s’appuyer sur « des intérêts stratégiques majeurs » que les Etats membres partagent dans ce domaine, afin de poser « les bases d’une réflexion et d’un cadre de coopération cohérent ». Il était temps. Surtout que, de son côté, l’OTAN a pu sortir un document semblable il y a plus de deux ans. La Lettre présente ensuite le centre de réaction d’urgence (Emergency Response Center, ERC) de la DG ECHO, inauguré en mai dernier, susceptible d’être activé « en cas de catastrophes naturelles et humaines pouvant impliquer ou non la mise en œuvre de la clause de solidarité ». Cette fameuse clause qui, de pair avec l’article 42 §7 sur l’assistance mutuelle, mais de manière plus pratique que celui-ci, pourrait servir de prélude à une (très éventuelle) défense collective. Finalement, l’IntCen, le centre d’analyse du renseignement de l’UE est passé au crible. Pour en arriver à la conclusion que, malgré toutes ses vertus, les deux mois qu’il lui faut pour produire une note quelconque font que son utilité opérationnelle est quasi nulle.
EADS devient Airbus Group - nouveau coup de maître pour dés-européaniser encore davantage ce qui fut pourtant censé être l'un des fleurons de notre industrie stratégique. Inutile de préciser que la vidéo instructive de la part de son président exécutif Thomas (Tom) Enders, concernant les changements à venir pour le groupe franco-allemand est disponible en anglais uniquement. Là-dedans il explique, entre autres, que « la partie ‘euro’ dans le nom d’Europcopter n’aide pas vraiment sur le marché international ». Apparemment c’est vrai pour l’ensemble. Autant l’en priver donc définitivement. Comme noté auparavant , en parlant des fiancés EADS et BAE : « les deux se présentent comme des leaders "mondiaux" ou "globaux" dans leurs domaines respectifs, et se méfient comme du feu de l’adjectif européen, jugé trop risqué du point de vue de leur projet prioritaire qui est la pénétration-conquête du gigantesque marché de défense des Etats-Unis. Or il n’y a pas deux façons de le faire. On n’y est vraiment admis qu’après avoir levé le soupçon même d’une quelconque interférence étrangère (et encore ; il arrive que le seul souvenir d’une origine autre qu’US suffise pour se retrouver sur la touche), et ayant accepté des règles du jeu garantissant une soumission totale aux intérêts américains. Ou mieux : en devenant, en Europe par exemple, la courroie de transmission de ces mêmes intérêts. »
Un nouveau rapport du Congressional Research Service américaina choisi comme sujet le Parlement européen (PE). En expliquant que les nouveaux pouvoirs que lui confère le traité de Lisbonne ne sont pas sans conséquences pour la partie US. A titre d’exemple, y sont cités l’accord SWIFT (donnant aux autorités américaines l’accès aux données financières européennes) et celui relatif aux données des dossiers passagers (Passanger Name Record, PNR), les deux ayant déjà dû être renégociés afin d’obtenir l’aval du PE. Surtout, le rapport fait état d’une inquiétude croissante quant à une éventuelle montée de la résistance du Parlement européen dans ces domaines, suite aux révélations sur les programmes de surveillance américains. Or l’accord SWIFT doit être renouvelé en 2015, l’accord PNR en 2019. Sans parler du fait que « l’approbation du PE va être nécessaire pour qu’un futur accord UE-US sur le Partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement puisse entrer en vigueur ». Dans ce contexte, la question hypothétique (« au cas où les révélations sont confirmées ») du président du PE, l'allemand Martin Schulz, à l’adresse de nos amis américains « Pourquoi vous traitez un allié comme un ennemi ? » est à prendre au sérieux, du moins un peu. Et les travaux de la mission d’information de la Commission des libertés civiles, établie par la Résolution du 4 juillet, méritent d’être suivis, ne serait-ce que pour voir comment d’inévitables vagues susceptibles de compliquer les relations UE-US finissent miraculeusement par être adoucies.
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