Analyse and essay
Jamais on n’a autant parlé et aussi publiquement de l’autonomie stratégique européenne que pendant l’année 2020, et rarement auparavant les limites politiques de ladite autonomie étaient apparues aussi crûment. Un paradoxe largement en phase avec l’oscillation de la posture américaine : tandis que sous l’administration Trump même les plus atlantistes des Européens ne pouvaient plus échapper à une certaine prise de conscience, après l’arrivée de l’administration Biden, en revanche, les efforts visent surtout à escamoter le fait que dans les relations transatlantiques seul le ton change.
1- La marche en avant de l’OTAN
Une expansion tous azimuts
(entre propagation et gains de fonction)
Un carcan politique
(le gendarme en puissance de la politique intérieure des Etats membres?)
Une intégration de plus en plus étroite
(ou la loyauté par l'(auto-)enfermement)
2- La dévaluation de la PSDC
Le concept d’« autonomie stratégique » sorti de la défense
"la prolifération du mot risque de cacher l’effacement de la chose. Alors même que dans l’UE le terme « autonomie stratégique », jadis tabou, est maintenant évoqué sans retenue et dans les secteurs les plus variés, son domaine originel, celui de la défense, s’atrophie à vue d’œil."
Le maigre bilan de la PSDC et sa fuite hors de l’UE
"Simultanément à ce détricotage de la PSDC, on remarque un déplacement de certaines initiatives hors du cadre de l’UE. Même sans Londres, les 27 ont du mal à se mettre d’accord... "
3- Le retour en force de l’éternel triptyque des relations OTAN-UE
Non-découplage ?
(nouvelle illustration à travers le différend gréco-turc)
Non-duplication?
(récents développements en matière de défense collective et politiques d'armement)
Non-discrimination?
(exemples de l'entrisme otano-américain dans les initiatives de défense européenne)
4- Union, quelle union ?
"Plus l’UE parle d’autonomie, plus les appels à « plus d’intégration » se multiplient. Dans cette narration, le passage à la majorité qualifiée créerait, d’un coup de baguette magique, une Europe-puissance parlant d’une seule voix, à même de jouer son propre rôle sur l’échiquier géopolitique. Mais une telle vision simpliste a tendance à confondre la forme et le fond. Ce n’est pas du fait de la règle de l’unanimité que l’UE est incapable d’avoir une politique de puissance indépendante, bien au contraire. La position majoritaire parmi les partenaires européens a toujours été d’ignorer, voire vilipender les concepts de puissance et d’indépendance. S’il ne tenait qu’à eux, l’Europe serait, depuis fort longtemps, un 51ème Etat américain voire, demain, une 24ème province chinoise. L’exigence de l’unanimité est le seul garde-fou qui reste pour les quelques-uns, souvent la France seule, qui sont attachés à l’idée d’être maîtres de leur destin et faire leurs propres choix."...
Le texte intégral: Hajnalka Vincze, L’OTAN reprend l’avantage dans son bras de fer avec l’UE, in Défense & Stratégie n°45, printemps 2021.